Ne parle pas aux inconnus !
Ma maman m'a toujours dit de ne pas parler aux inconnus. Cette recommandation étant inscrite à l'encre indélébile dans la charte du bon parent, vous avez probablement eu droit au même conseil. Petite, j'adoptais un comportement raisonnable (#paslechoix). En grandissant, je suis devenue un jedi. A mes risques et périls, je me suis mise à converser avec des inconnus. Je me rappelle une histoire rocambolesque qui m'est arrivée il y a cinq ans. Ne me jugez pas car j'étais jeune, j'étais bête et je n'ai pas changé.
Lyon - Résidence V.
Il est 21h. On frappe à ma porte. Pourquoi se méfier ? Il est normal qu'on frappe à ma porte d'autant plus que je suis en résidence étudiante. Je n'attends personne mais c'est sûrement un voisin qui aurait besoin d'un peu de lait. J'ouvre et j'aperçois un sombre inconnu. Oui, monsieur ? [erreur : j'aurais du refermer la porte aussi promptement que je l'avais ouverte]. Bonsoir mademoiselle, puis-je entrer ? Je voudrais vous parler. Oui [no comment]. Il entre. Je ne l'invite pas à s'asseoir [encore heureux]. Il me raconte une histoire : je représente une association. Nous recherchons des fonds pour aider des personnes en difficulté. Ah ? Nous aidons des individus à se réinsérer professionnellement. Ah ? Vous voulez dire qu'après un long moment d'inactivité, ces personnes ont du mal à retrouver un emploi ? En réalité, nous aidons une autre catégorie d'individus. Les anciens prisonniers. Ah ? Je suis moi-même un ancien prisonnier et j'ai bénéficié de ce programme [crise d'angoisse intérieure : pourquoi il dit ça, pourquoi il dit ça, pourquoi il dit ça ? C'est un message subliminal ? Il me menace ?]. Regardez, je vous ai apporté un document de présentation de notre association. Je regarde le document qui a évidemment l'air aussi réel qu'une lettre d'acceptation à Poudlard. Si vous nous aidez, je vous laisse cette jolie carte postale en guise de reconnaissance. Alors ? Bah. Allez, vous êtes sympathique. Soyez généreuse [c'est la panique, panique, panique sur le périphérique : je suis tétanisée]. Je vais chercher mon portefeuille. Je l'ouvre. Je pense donner dix euros. Ce sera le prix de ma liberté. Nous en avons réellement besoin. N'hésitez pas ...
Conclusion : je n'avais qu'une seule envie c'était que ce sombre inconnu à l'air louche s'en aille au plus vite. Et il s'en est allé. Je suis restée perplexe. J'ai fait ce que je fais toujours en cas de crise de perplexité aiguë. Allô, maman, il m'est arrivé un truc bizarre [bla, bla, bla]. Oui, j'ai payé cinquante euros une carte postale. Oui, mais j'avais peur. Oui, je sais que les conséquences auraient pu être beaucoup plus graves. Ouiiiiii. J'ai décidé de passer sous silence la réaction épidermique de ma maman qui, ce jour là, a perdu (momentanément) foi en sa fille.
Ne parle pas aux inconnus. Je dirais même plus, ne les laisse pas entrer chez toi. J'ai gardé la carte postale et je l'ai accrochée au mur. Elle me rappelle ma bêtise. Malheureusement, cette histoire n'est pas un cas isolé. L'année dernière, je me baladais dans les rues de Marseille et un sombre inconnu m'a apostrophée. Mots clefs : association, enfants en difficulté, sucres d'orge en guise de récompense, 20 euros. Je n'ai pas raconté cette histoire à ma maman. Je dois conserver un semblant de dignité. Je pense que ma réaction est guidée par la peur de l'inconnu. Je sais que c'est du pipeau mais j'ai peur de cette promiscuité peu engageante. J'ai peur de dire non et d'en subir d'hypothétiques conséquences.
[A ce stade de rédaction du billet, l'auteur se sent bête. Dîtes moi un mot gentil, svp]
Aujourd'hui, je n'ai rien appris et je continue à parler aux inconnus. Fort heureusement, il ne m'arrive pas que des expériences désagréables. Il y a quelques semaines, je me suis inscrite sur Hellocoton et j'ai tissé des équations relations à plusieurs inconnues. Je vogue d'univers en univers, je m'abonne et je me fais des copines. Plaît-il ? Ce n'est pas la même chose. Si. Ce sont des inconnus. Rien ne me garantit la bonne foi de la personne cachée derrière son écran [paranoïa activée]. Mais je continue mon petit manège et je continue à leur parler, tous les jours. Tenez, la dernière fois, j'ai même révélé mon adresse à quelqu'un [violation de la règle de sécurité n°1 : ne jamais communiquer d'informations personnelles sur internet]. Pourquoi ? La réponse en image.
Chers lecteurs, vous l'avez compris. J'ai gagné un concours. On S'en Blog Tantôt m'a fait parvenir un colis et m'a écrit un mot gentil. Je suis tellement contente. Ma maman : mais c'est super ma chérie. Moi : tu vois que tous les inconnus ne sont pas des monstres et qu'il faut parfois leur faire confiance. Et puis, je ne t'ai pas dit. Mon meilleur ami a trouvé l'amour sur adopte un mec, il a fait confiance à une inconnue qui en a fait de même. Et depuis, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Et aux dernières nouvelles, aucun des deux n'adopte un comportement de psychopathe. Tu as vu maman ? C'est la société qui nous encourage à parler aux inconnus. Ton conseil est tout de même bien obsolète [mauvaise foi activée].
Chers lecteurs, je sais bien que je ne suis pas toujours un modèle à suivre. J'ai beaucoup d'autodérision mais je peux vous assurer que certaines situations ne sont pas plaisantes à vivre. Goût du risque ou manque de jugeote avéré ? Pensez vous qu'il ne faut pas parler aux inconnus ?